Brétigny: des aiguillages « pourris et non conformes », un an après la catastrophe

 
 
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Brétigny: des aiguillages « pourris et non conformes », un…

Plus de deux ans après le déraillement du train de Brétigny, Mediapart révèle le contenu des écoutes téléphoniques menées dans le cadre de l’enquête sur la SNCF et …
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Le président de la SNCF Guillaume Pepy avait annoncé en 2014 une réduction de la vitesse de passage des trains dans la zone de l'accident.
Le président de la SNCF Guillaume Pepy avait annoncé en 2014 une réduction de la vitesse de passage des trains dans la zone de l’accident.
REUTERS/Benoit Tessier

Plus de deux ans après le déraillement du train de Brétigny, Mediapart révèle le contenu des écoutes téléphoniques menées dans le cadre de l’enquête sur la SNCF et pointe des problèmes graves de maintenance qui ont perduré plusieurs mois après le drame.

Deux ans et demi après le déraillement du train de Brétigny qui a fait sept morts en juillet 2013, Mediapart rend public les écoutes téléphoniques ordonnées par les juges d’instruction d’Evry dans le cadre de l’enquête judiciaire et révèle de graves problèmes de maintenance. Selon nos confrères, les aiguillages de Brétigny seraient restés usagés et « non conformes » jusqu’à un an après le drame. « En clair, malgré le choc provoqué par l’accident, la SNCF a, en connaissance de cause, laissé 350 trains par jour rouler sur des aiguillages ‘pourris’ et ‘non conformes' ».  
Mandaté comme expert puis nommé patron du secteur, Christophe Bohly rend des comptes à Régis Ambert, le chef des experts de la maintenance et son bilan est accablant. Celui-ci pointe en effet la « multiplication des quasi-accidents » ainsi que l’indifférence des équipes qui ne remplissent pas les fiches d’incidents et ne travaillent pas la nuit, alors que cette période est propice à la réalisation d’opérations de maintenance lourdes. « Ils s’en branlent. Ils en ont rien à foutre », alarme-t-il. Est également repéré un problème de taille : les aiguillages ne sont pas démontés lors des grandes opérations de vérification, ce qui rend 60% des fissures indétectables.  

Des centaines de défauts sont découverts, seuls quelques-uns sont traités

« C’est un truc catastrophique ! Quand tu vois les rapports, il n’y en a pas un qui est bon. […] La maintenance, c’est pas qu’elle est un ‘peu pas bonne’, c’est qu’elle est ‘super mauvaise' », s’inquiète Régis Ambert. Il alerte la direction: « Au-delà de la non-conformité, c’est que le matériel il est en fin de vie. On n’arrive plus à maintenir ». Sont dénombrés au total 300 défauts, mais seuls les plus graves sont réparés, pendant que les autres s’aggravent. 
En somme, après l’accident de train de Brétigny, les incidents se multiplient. Des éclisses se brisent sur un nouvel aiguillage, des boulons « pètent » parce qu’il s’agit de modèles « interdits ». « Il y a même de la casse sur l’aiguillage tout neuf qui a remplacé celui qui a causé l’accident ! » s’étonne Mediapart. « Car cette traverse de jonction (TJ) a été mal montée ».  

Vers une réduction de vitesse des trains

« Elle a été posée dans le trou, à l’arrache parce qu’il fallait rendre… […] Ce n’est quand même pas l’exemple parfait de remplacement d’appareil quoi ! », déplore Christophe Bohly au téléphone. Face à la situation, ce dernier demande à ce que la vitesse soit réduite à 100 km/h sur l’ensemble de la gare de Brétigny pour soulager les infrastructures déjà très fragilisées. « Je l’ai dit à Izard (…) Alors il l’a noté mais c’est tout ».  
La SNCF qui s’inquiète d’être perçue comme coupable si elle réduit la vitesse de ses trains, fait la sourde oreille. Après un débat de quatre mois, l’entreprise ferroviaire mandate finalement un expert et le bilan est sans appel : « Faut arrêter ! Ça tape, faut voir comment ça danse et tout. Cette TJ, y a une dizaine d’attaches manquantes […], des attaches où tu tapes avec le pied et ça bouge. Donc, faut arrêter de jouer là. J’aurais voulu avoir la vidéo avec l’Iphone, […] c’est impressionnant, 150 [km/h] ça déboule hein, y a pas pitié là hein ! » Hervé Chapui rend un rapport accablant et décrit un « paysage quasiment de guerre ». Une note que la SNCF tentera, en vain, d’édulcorer pour se protéger.  
Le 7 juillet 2014, Guillaume Pepy annonce (enfin) une réduction de vitesse de ses trains sur la totalité des installations de Brétigny. En outre, l’ensemble de l’aiguillage devrait être remplacé mais en dépit de l’accident mortel, la SNCF n’a pas accéléré le chantier, rapporte Mediapart qui précise que le site devrait être remis à neuf d’ici à 2019. 

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