SNCF Réseau voit sa dette encore enfler de 3,1 milliards d’euros

SNCF Réseau (ex-Réseau ferré de France), le gestionnaire des voies de chemin de fer en France, continue à vivre au-dessus de ses moyens. Et, par conséquent, à s’endetter. A la fin de 2014, la perte nette a atteint 213 millions d’euros, elle était de 60 millions en 2013, pour un chiffre d’affaires de 5,9 milliards d’euros, en progression de 4 %, a annoncé l’entreprise publique, jeudi 19 février.

Par contre, la dette s’est accentuée de manière beaucoup plus forte. En 2014, elle représentait 36,78 milliards d’euros, contre 33,7 milliards un an plus tôt. La dérive de la dette de SNCF Réseau n’est pas complètement de la faute de l’entreprise publique. Tant s’en faut. Certes, et depuis de nombreuses années, l’ex-RFF ne couvre pas complètement ses coûts de maintenance et de développement du réseau faute de financements publics suffisants. Mais en plus, SNCF Réseau est plombé par des frais financiers de 1,4 milliard d’euros annuels pour gérer de la dette héritée en 1997 de la SNCF.

A cela s’ajoutent les décisions de l’Etat, pas toujours cohérentes. Ainsi, entre 2012 et 2016, le gestionnaire de voies ferrées doit débourser sur ses deniers — qu’il n’a pas et qu’il doit donc emprunter — 1 milliard d’euros par an pour payer en partie les quatre nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) actuellement en construction.

LA DETTE DÉRIVERA MOINS VITE APRÈS 2017

Une fois que ces lignes seront installées, une règle d’or entrera toutefois en vigueur, imposée par la réforme ferroviaire votée à l’été 2014 : si l’Etat décide d’une LGV, il ne pourra en faire porter la responsabilité financière à SNCF Réseau. La mesure est tardive, mais elle devrait être dissuasive pour le développement à crédit du réseau.

En attendant, la dette va continuer à enfler jusqu’en 2017 de façon importante. Elle devrait ralentir son expansion à mesure que les dépenses baissent et que le groupe améliorera sa productivité et rationalisera ses achats. D’ici à 2020, SNCF Réseau promet une baisse de ses coûts et de ses achats de 500 millions d’euros, en revoyant notamment ses coopérations avec ses fournisseurs.

LES MAUVAIS PAYEURS PÈSENT SUR LA TRÉSORERIE

Par ailleurs, SNCF Réseau doit faire face à plus de 1,35 milliard d’euros de créances non payées dans ses comptes par les collectivités publiques. Si les lignes à grande vitesse en construction ont été confiées à des géants du BTP sous la forme de partenariats publics privés, la moitié de ces projets est payée par de l’argent public. Que ce soit SNCF Réseau, l’Etat ou les collectivités publiques. Dans ce cas, c’est l’entreprise publique qui perçoit l’argent des collectivités et le rétrocède aux groupements de construction des lignes.

Or, les collectivités refusent de payer pour faire pression politiquement sur l’Etat. Ainsi, pour la ligne du TGV-Est, par exemple, certaines collectivités réclament l’électrification de la ligne Paris-Troyes, une décision qui n’a jamais été actée. Et l’entreprise publique devrait traîner ces collectivités au tribunal pour qu’elles finissent par payer.

Pour la ligne Paris-Bordeaux, les collectivités au nord de Bordeaux ont cessé leur paiement de la nouvelle ligne TGV en attendant de savoir si elles seront correctement (à leurs yeux) desservies par la nouvelle ligne. Et au sud de Bordeaux, les collectivités refusent de payer tant que la prolongation de la ligne vers Toulouse n’est pas actée…

LES TRAFICS BAISSENT, LES TRAVAUX AUGMENTENT

Parallèlement, du fait à la fois de la conjoncture, de la grève de juin 2014 et de la rationalisation de l’offre de la SNCF (moins de trains, mieux remplis), le trafic sur les voies gérées par SNCF Réseau baisse un peu (de 1,6 %) et avec lui les revenus. Sur dix ans, le trafic a chuté de 10 %, entre le fret et le voyageur, pesant sur les comptes de l’entreprise. Dans les régions, cela devrait se poursuivre à mesure que les collectivités régionales rationalisent leur offre.

Malgré cela, la SNCF n’entend pas ralentir les travaux. En 2015, le gestionnaire d’infrastructure investira 2,14 milliards d’euros pour la maintenance et 2,77  milliards pour la rénovation, soit deux fois et demie plus qu’en 2007. La seule Ile-de-France bénéficiera d’une enveloppe de 1,1 milliard d’euros. Et au total, quinze cents chantiers devraient être engagés pour rénover un millier de kilomètres de voies, comme en 2014.

Faute de bras, une vingtaine de programmes de travaux prévus en 2015 seront repoussés à 2017, comme l’a annoncé Alain Vidalies, le secrétaire d’Etat aux transports mercredi 18 février, le temps de lancer les quatre nouvelles LGV, qui mobilisent de nombreux salariés de SNCF Réseau.

Cependant, malgré l’augmentation des moyens affectés à la rénovation du système ferroviaire, le réseau poursuit son vieillissement d’un mois et demi par an. Il faudra attendre 2025, si SNCF Réseau conserve ce niveau d’investissement soutenu, pour que le réseau commence à rajeunir…

 

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